Quelle solution pour assainir le canal lagunaire de Lomé ?

Une étude physicochimique publiée en mai 2015 dans le « European Scientific Journal » sur la pollution du système lagunaire de Lomé révèle une forte contamination des eaux du système en « éléments chimiques et en micro-organismes potentiellement pathogènes qui peuvent être à l’origine de nuisances environnementales et de risques sanitaires significatifs ».

L’étude menée par des chercheurs de l’Université de Lomé et de Limoges Cedex (France) indique que les eaux du canal présentent une teneur élevée en matières organiques dissoutes, en azote (15mg/l), en phosphore (1,27 mg/l), en permanganate (17,1mg/l) ainsi que des Eléments Traces Métalliques (ETM) et des Matières En Suspension (MES). « La forte proportion de matières organiques entraine une faible teneur en oxygène (1,5mg/l alors que la teneur minimale est 2mg/l, ndlr); ce qui a un effet négatif sur l’écosystème aquatique » souligne l’étude.« Il y a donc de fortes probabilités que les systèmes d’eaux dans la zone du canal lagunaire soient contaminés ainsi que les produits halieutiques provenant du canal » précisent les chercheurs.

Origine anthropique

Cette pollution est essentiellement d’origine anthropique selon les chercheurs. A côté de la défécation à l’air libre et l’érection des dépotoirs intermédiaires aux abords du canal, l’étude pointe du doigt le système d’évacuation de déchets « inapproprié » mis en place par les ménages situés dans la zone.

Du fait de la proximité avec la mer et le canal, la plupart de ces ménages sont confrontées à des obstacles hydrogéologiques qui les obligent à brancher leur système d’évacuation de déchets (fosses septiques, puisards…) sur les canaux d’évacuation d’eaux pluviales qui débouchent directement dans la lagune.

« Dans la basse ville, le nappe est à fleur. Il est donc difficile de creuser au-delà d’un mètre sans tomber sur de l’eau. Les populations se voyant ainsi dans l’incapacité de creuser des fosses septiques sont obligés de brancher leur canalisation sur les canaux d’eaux pluviales ou les égouts mis en place par l’Etat pour éviter le débordement du canal lagunaire» explique M. K. Kazimna, un technicien de la Direction de l’environnement.

Solution onéreuse

Pour le technicien, la mise en place d’un système d’assainissement collectif dans la zone du canal lagunaire pourra permettre de résoudre de façon « durable et efficace » les problèmes de pollution du système lagunaire.
Il s’agira dans la pratique de mettre en place un système public de collecte des eaux usées sur lequel les populations pourront se raccorder par abonnement.

« Le système devra être composé de canaux partant des ménages abonnés et débouchant sur un grand bassin où doit être prévue une station d’épuration qui traite les eaux usées. Les eaux purifiées seront rejetées dans la nature tandis que les éléments organiques mis de côté peuvent ensuite servir d’engrais dans le domaine agricole » explique M. Kazimna.
Mais seulement, précise le technicien, le coût trop élevé du système serait le principal obstacle de sa mise en place par l’Etat togolais. La solution a par ailleurs été développée dans plusieurs villes de la sous région comme Ouagadougou (depuis 2004 avec l’appui de l’Agence Française de Développement) et Cotonou.

Toutefois, cette solution est prise en compte par la deuxième phase du Projet d’aménagement urbain au Togo (PAUTII) dont l’une des composantes prévoit l’assainissement collectif pour les quartiers Akodéssewa, Kagnikopé et Baguida. Subventionné par l’Union Européenne, la fin des travaux du PAUT II, dont le cout est estimé est 43 millions d’euros, est prévue pour 2019.

Selon des données de l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) près de 2,2 millions de décès dans le monde (dont 15% concernent les moins de 5ans dans les pays en développement) sont dus aux manques d’assainissements inadéquats.

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